Mar 30, 2018
En attendant d’avoir lu le dernier livre de France Guillain « J’allaite mon enfant » (Ed. La Plage), je partage l’article très pertinent de Coline Enlart, publié dans Top Nature (mars-avril 2018).
En effet, par ce blog, j’ai envie de vous apporter toutes sortes de ressources qui abordent le devenir maman sous toutes ses coutures. On voit passer beaucoup d’infos sur les réseaux sociaux ou dans les magazines, parfois difficile à retrouver ou qui, trop vite, se diluent dans la masse : on finit par perdre le fil. Cet article est précieux, je souhaitais qu’il reste accroché quelque part sur la Toile, ici 🙂
Coline Enlart est journaliste, « tendanceuse » BIO et fondatrice dudit magazine top, que vous trouverez dans vos magasins bio (Naturalia) ou aussi ici en pdf. Egalement au sommaire du bimestriel ce printemps, découvrez des recettes pour les veggies kids et l’interview de Shantala Shivalingappa, danseuse virtuose que j’adore, qui parle de son choix d’être vegan.
Et pour en revenir à France Guillain, elle est l’auteure entre autre du Bain dérivatif, qui permet d’agir sur l’inflammation, mère de nombreux problèmes de santé. J’ai aussi une petite pensée pour elle les matins où je me prépare un Miam Ô Fruits, l’un de mes petits-déjeuners incontournable depuis déjà quelques années. Sans plus attendre, voici l’article qui vous permettra de la découvrir un peu plus au passage :
Aujourd’hui, nombreuses sont les femmes qui considèrent que l’allaitement n’est pas compatible avec leur vie active et leur autonomie. Dans son nouveau livre, France Guillain anticipe leur questionnement et leur donne les clés d’un allaitement réussi et d’une maternité active.
France Guillain n’est pas tombée de la dernière pluie. Aux antipodes de ces auteurs de livres de compilation qui ne font que rassembler des lieux communs au titre de conseils pratiques, elle sait de quoi elle parle et ses guides s’avèrent nourris par l’expérience. Une soixantaine de livres au total dont aujourd’hui J’allaite mon enfant, longtemps après son ouvrage emblématique Le bain dérivatif qui met en lumière une technique naturelle aussi révolutionnaire qu’accessible puisqu’elle ne demande qu’un peu d’eau pour être appliquée.
Aux yeux de France Guillain, l’allaitement se présente comme une évidence : elle a elle-même allaité ses cinq enfants alors que sa vie ne se résume pas vraiment à un long fleuve tranquille, plutôt à une expédition sur les terres de la découverte et de l’ouverture d’esprit. Vingt ans de tour du monde à la voile ponctués de diplômes et de recherches scientifiques en même temps que de naissances d’enfants : France Guillain ne s’en laisse pas conter et le récit de son parcours révèle une détermination sans faille au cœur de laquelle les méthodes naturelles font figure de repères et ont tout à gagner car elle sait les utiliser avec intelligence, les conseiller avec discernement. Son expérience de l’allaitement traduit une vraie connaissance des fondamentaux tels que l’argile verte, l’alimentation saine, les bains dérivatifs, évidemment, et tous ces gestes de bienveillance quotidienne envers notre corps et celui de notre enfant que nous, femmes autonomes et sereines, avons appliqués au fil de nos années d’engagement personnel envers la grossesse, la naissance et la petite enfance.
NOUS NE SOMMES PAS DES FONCTIONS
Le préambule de France Guillain est clair et net : l’amour maternel ne se mesure pas à la manière de nourrir son enfant. Nous ne sommes pas des fonctions, assène-t-elle d’emblée et cette prise de parole a le mérite de bien camper les frontières de la maternité. Que personne ne s’aventure à faire de l’auteur une égérie exaltée aux attributs idéologiques : ce n’est pas son propos. A travers un allaitement naturel à la demande, il ne s’agit pas de servir la soupe à quelque mouvement bien-pensant que ce soit, fût-elle BIO et de saison. Le pouvoir aux femmes et aux bébés !
La mère, et la mère seule, doit décider d’allaiter ou non son bébé au sein. Les critères de cette décision doivent être examinés à la lumière d’éléments objectivables et non de diktats sociaux qui ne peuvent que réduire l’autonomie des femmes, qu’ils orientent le choix dans un sens ou dans l’autre.
Non, la maman ne peut pas ignorer que le lien de corps entre elle et son bébé, ce maternage favorisé par l’allaitement permet de tisser un attachement profond sur lequel les bases de la sécurité intérieure se construisent. Et plus tard, l’autonomie : comme un lien qui libère.
Pas plus qu’elle ne peut ignorer que le colostrum du lait maternel (liquide épais et jaunâtre faisant office de « lait des premiers jours »), encourage fortement le bon fonctionnement du système immunitaire de l’enfant à coup d’immunoglobulines qui vont jouer à long terme un rôle anti-infectieux très important. Des protéines, donc, mais également des vitamines et des minéraux : un trésor à l’état brut. Chez France Guillain, les cinq enfants, des filles, ont été allaitées, en mer ou à terre, entre un an et un an et demi, qu’elle eût à travailler comme tout le monde ou à barrer son bateau, pas comme tout le monde. Comme elle le dit elle-même : « Une des merveilles avec le lait maternel, c’est que les bébés ne sont pas malades ou vraiment si peu que l’on ne se fait pas de souci pour leur santé. Pas de diarrhées, pas de constipation, l’essentiel est que la maman se nourrisse avec intelligence. Et qu’elle mastique bien des produits frais, naturels. » Nous ne sommes pas réductibles à des fonctions, nous sommes libres, nous avons le choix : à nous de nous donner les moyens de ce choix sans nous placer a priori dans le spectre obscur de l’esclavage et de la soumission, alimenté tant par des lobbys que par les idées reçues.
ET LE FÉMINISME ?
La décision de l’allaitement maternel pose de vraies questions sur le rapport à son enfant que l’on entend privilégier sur la durée. Avant toute chose, à quels mécanismes inconscients fait appel cette décision, tant en terme d’histoire familiale que de projection sociale ? Comme le souligne France Guillain, trois types de compétences définissent l’allaitement maternel pour les mammifères que nous sommes : l’instinct, les compétences archaïques et les compétences acquises. Alors que, fortes de leur pouvoir tentaculaire, les idées reçues persistent à mettre à mal des données scientifiques, physiologiques et psychologiques en faveur de l’allaitement maternel, de nombreuses femmes prouvent que l’on peut parfaitement mener une vie professionnelle, une vie conjugale et une vie personnelle équilibrées tout en favorisant le développement affectif de son bébé par l’allaitement. N’en déplaise aux féministes de pacotille qui envahissent les réseaux sociaux de leur discours inféodé aux stéréotypes dominants, le féminisme est affaire d’autonomie durable, pas d’infantilisme normatif, et il s’accommode fort bien de la liberté d’allaiter. France Guillain passe ainsi en revue ces idées convenues tout en donnant immédiatement au « problème » qu’elles soulèvent la solution concrète qui leur tord gentiment le cou, de l’allaitement qui abime la poitrine aux seins trop petits pour allaiter, en passant par l’absence de bouts de seins et autres craintes dites féminines. Quant à la psychanalyse mal comprise qui culpabiliserait systématiquement les femmes qui allaitent sou prétexte qu’elles étouffent leur enfant (???), nous avons ainsi connaissance de ses limites : il ne s’agit pas là de psychanalyse mais encore une fois de discours social inversé. Un assujettissement de plus.
LES BONS ACIDES GRAS
Obstétricien, ancien chef du service de chirurgie et de la maternité pilote de Pithiviers puis sage-femme à domicile en Angleterre, le docteur Michel Odent a écrit avant tout le monde, en 1990, un ouvrage très documenté sur l’importance pour le développement du cerveau de l’enfant, des acides gras essentiels contenus dans le lait maternel. Ainsi que le rappelle France Guillain dans son livre, l’allaitement maternel favorise des connexions synaptiques dans le cerveau du bébé qui ne seraient jamais activées autrement, et ce sont les acides gras polyinsaturés présents dans le lait maternel qui expliquent ces connexions. Ils interviendraient non seulement au niveau du développement cérébral et rétinien, mais aussi au niveau de la synthèse des médiateurs de l’inflammation et des médiateurs vasculaires. Sur ce point réside sans doute l’un des arguments les plus déterminants en faveur de l’allaitement maternel en terme de santé pour l’enfant. Dans ce sens, l’OMS préconise aujourd’hui un an d’allaitement. Et personne ne songerait à reprocher à l’OMS de défavoriser les lobbys des laits maternisés ! Précisons cependant au passage qu’en cas d’impossibilité de mettre en place un allaitement confortable et joyeux, ce sont bien évidemment des laits maternisés certifiés BIO qu’il convient de choisir.
Sachant qu’un allaitement au sein se prépare avant la naissance du bébé, les solutions naturelles s’imposent au fil des jours à la maman qui apprend à les connaître. Argile verte, bains dérivatifs, huiles de massage pour les seins, tisanes galactogènes, alimentation biologique complète privilégiant les céréales, légumineuses, graines germées, huiles de première pression, fruits séchés, fruits et légumes frais de saison, et limitant sérieusement les apports de produits laitiers conventionnels ainsi que la consommation de gluten : l’allaitement ne sera qu’un jeu d’enfant qui apportera une joie profonde au bébé, à la maman et à son compagnon, ou sa compagne.
L’ACCOUCHEMENT
Les conditions d’accouchement déterminent en grande partie les conditions d’allaitement. Plus la future maman se trouve stressée par le contexte hospitalier, l’encombrement de la maternité, la précipitation de l’obstétricien, la surcharge de travail des infirmières…, moins l’évidence de l’allaitement s’imposera à elle si elle se sent insécurisée et par conséquent vulnérable à la pression extérieure. Non, il ne faut pas accepter de biberon « en attendant » aux tous premiers instants sur terre du bébé. Oui, il faut lui laisser le temps de prendre le sein quand il est allongé sur le ventre de sa maman, au moment de sa naissance. Oui, il est préférable de le garder contre soi, en peau à peau, lorsqu’il voit le jour. Oui, un petit bain avec la complicité du papa s’avère bienvenu au plan sensoriel pour compenser la brutalité de la sortie du ventre maternel… Oui, génial obstétricien précurseur, puis écrivain et photographe, Frédérick Leboyer voyait juste lorsqu’il disait que la naissance doit être pratiquée sans violence… Oui la douceur de l’accueil dans le cadre de l’accouchement enfante un sentiment de sécurité durable pour le bébé et favorise l’autonomie affective de l’adulte qu’il sera bientôt… C’est en lien avec tous ces paramètres que l’allaitement s’inscrit harmonieusement. Oui, l’allaitement désiré est une merveille. Le bébé est un mammifère, répétait Michel Odent. Oui, nous sommes des mammifères, heureuses de prendre dans la société la place que nous choisissons et d’offrir cette autonomie à nos bébés à travers une naissance sans violence et un allaitement qui célèbre la plénitude.
Crédits Photos : John Dowland
A LIRE :
– Attendre bébé autrement, Catherine Piraut-Rouet & Emmanuelle Sempers-Gendre, Ed. La Plage
– Elever son enfant autrement, Catherine Dumonteil-Kremer Ed. La Plage
– Pour une naissance sans violence, Frédérick Leboyer, Ed. Seuil (collection Points)
– Shantala, Frédérick Leboyer, Ed. Seuil
– Le Bébé est un mammifère, Michel Odent, Ed. L’Instant Présent
J’ajoute :
– Quels laits pour mon bébé, Candice Levy, Ed. Souffle d’Or
– La page de France Guillain
RESSOURCES ALLAITEMENT :
– Véronique Darmangeat, conseillère en allaitement IBCLC et formatrice : Centre Allaitement et blog A tire d’Ailes
– Carole Hervé, Question d’allaitement, conseillère en allaitement IBCLC (Carole se déplace à domicile, propose également des consultations par Skype/Facetime, et in English if needed)
– La Leche League
Juil 22, 2013
Le microbiote, l’autre nom de la flore intestinale, renferme des milliards de bactéries qui nous aident à digérer et jouent un rôle primordial dans notre immunité. En effet, grâce à la production d’enzymes, ces bactéries participent à l’assimilation des nutriments que nous absorbons et à la dégradation des déchets que le corps éliminera ensuite. Sur le plan immunitaire, la flore joue à la fois un rôle de barrière contre la colonisation des bactéries et favorise le développement et la maturation de nos défenses naturelles.
Cette population bactérienne formerait une masse de 1,5 à 2 kg chez l’adulte. Chaque microbiote est unique (même si les espèces bactériennes sont semblables d’une personne à l’autre) et constitue ainsi une véritable « empreinte digitale » du tube digestif.
La constitution du microbiote commence à la naissance (dès la rupture des membranes fœtales), c’est pour cela que Michel Odent parle de la naissance également comme d’une naissance bactériologique, de la plus haute importance pour le reste de notre vie. « L’avenir de la flore intestinale dépend de la nature des germes qui seront les premiers à occuper le territoire. […] Le nouveau-né a besoin d’être contaminé au plus vite par les microbes satellites de la mère, c’est-à-dire les microbes domestiques. Ainsi sera-t-il mieux protégé contre l’agression par des microbes plus dangereux », peut-on lire dans Le Bébé est un mammifère (Ed. l’Instant Présent). La naissance par voie basse ainsi que l’absorption du colostrum des premières heures par le bébé favorisent donc grandement le bon développement de sa flore intestinale, c’est-à-dire de son « capital santé ».
Par la suite, le contact de l’enfant avec les microbes continuera à travers ses différents jeux et activités pour lesquels il s’agira de trouver la juste mesure entre la saleté excessive et des environnements exagérément aseptisés.
Pour plus d’informations sur le microbiote, je vous laisse découvrir un extrait de la lettre d’information « Santé Nature Innovation» publiée par Jean-Marc Dupuis :
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Nous sommes les microbes et nous sommes vos amis
Pour chaque cellule dans votre corps, vous avez 100 microbes de toutes sortes qui pullulent dans votre bouche, vos oreilles, sur votre peau, vos organes génitaux et, surtout, dans vos intestins. Chez un adulte, leur nombre avoisine 100 000 milliards.
Cela peut paraître dégoûtant mais, en réalité, la plupart de ces microbes semblent ne rien faire. Certains vous rendent service. Seule une petite minorité d’entre eux sont dangereux : les microbes pathogènes, c’est-à-dire générateurs de maladies.
Pourquoi prendre soin de vos microbes
Quand j’écris que la plupart de ces microbes semblent ne rien faire, ce n’est pas tout à fait exact. En réalité ils ont d’abord le mérite, dans l’immense majorité, d’occuper l’espace. Ils empêchent les microbes pathogènes de s’installer et de se multiplier. En ce sens, leur présence constitue une cuirasse de défense indispensable à notre vie. La dernière chose que vous puissiez souhaiter serait d’éliminer à coup d’eau de javel les bactéries recouvrant un de vos organes sensibles, par exemple vos organes génitaux ou votre intestin. Loin d’être « enfin propre », l’espace ainsi nettoyé serait immédiatement colonisé par de nouveaux arrivants dont rien ne vous garantit qu’ils auront le cœur pur et l’esprit rempli de bonnes intentions. C’est ainsi que se produisent les infections. .
Il est donc regrettable que nous dépensions tant d’énergie depuis plus d’un siècle à vouloir tuer les microbes sans distinction à coup d’antiseptiques, de fongicides et d’antibiotiques pas toujours indispensables. (NB : ceci n’est pas une critique des antibiotiques, mais des abus d’antibiotiques).
Même si nous ne les voyons pas, même si nous ne les connaissons pas, la plupart de ces bactéries sont nos amies. Et avoir 100 000 milliards d’amis, ce n’est pas rien !
Votre microbiote intestinal, foyer de votre santé
Parmi ces microbes, les plus nombreux et les plus importants pour la santé sont les bactéries et levures qui vivent en symbiose dans votre intestin et qui constituent la « microflore intestinale », ou « microbiote ».
Avant d’en parler, je signale à mes aimables lecteurs que les notions que nous aborderons sont à l’extrême pointe des connaissances scientifiques actuelles, ce qui m’obligera à une certaine prudence. Très prometteur pour la médecine du 21e siècle, c’est un domaine extrêmement complexe, du fait des interactions entre l’organisme et des myriades de bactéries qui évoluent très vite, qui plus est dans un environnement difficile à reproduire : on ne peut pas, en effet, réaliser in vitro (en laboratoire) ce qui se passe dans votre intestin, et l’observation in vivo (chez une personne vivante) reste très difficile. La connaissance dans le domaine des bactéries intestinales progresse donc lentement, et de façon incertaine.
Bref rappel sur la structure des intestins
Vos intestins sont un long tuyau tapissé d’une muqueuse appelée épithélium intestinal, elle-même formée d’une fine couche de cellules appelée entérocytes dont la structure en brosse (sorte de velours dont chaque poil est appelé villosité intestinale) en augmente considérablement la surface d’échange. C’est en effet l’épithélium intestinal qui assure les échanges entre le milieu extérieur et l’intérieur de votre corps.
Oui, je sais, il est curieux de penser que les choses qui passent dans les intestins sont à l’extérieur du corps, mais c’est un fait : tant que les nutriments n’ont pas traversé la paroi intestinale, pour rejoindre le sang, ils restent à l’extérieur de votre corps, tout comme l’air qui entre dans vos poumons reste à l’extérieur tant qu’il n’a pas pénétré dans le sang. La différence entre les intestins et les poumons est que, dans le cas des poumons, ce qui n’est pas absorbé ressort par le même trou (la bouche).
Déplié, la surface développée des villosités de votre épithélium intestinal couvriraient la surface d’un terrain de tennis. Et bien que cette muqueuse soit très fine, elle doit résister à toute épreuve : pas moins de 50 tonnes de nourriture lui passeront à travers pendant votre vie ! De plus, elle est peu irriguée de vaisseaux sanguins.
Votre épithélium est protégé et nourri par les bactéries
Le secret de la résistance et de l’intégrité de l’épithélium intestinal est qu’il est recouvert de microbes qui le protègent et le nourrissent. Ils sont plusieurs centaines d’espèces de bactéries et de levures, qui constituent, nous l’avons dit, « le microbiote ».
Ce microbiote se nourrit entre autres de fibres. Les fibres sont des éléments qui se trouvent dans notre alimentation mais que nous ne pouvons ni digérer, ni absorber. On en trouve abondamment dans tous les fruits et légumes. Elles nous sont indispensables d’une part parce qu’elles régulent le transit intestinal, d’autre part parce qu’elles sont nécessaires à l’entretien de l’épithélium intestinal. Les bactéries et les levures qui tapissent la muqueuse intestinale en raffolent. En effet, ces bactéries et levures font fermenter les fibres pour les dégrader et les absorber. Ce processus aboutit à la production d’acides gras à chaînes courtes, qui, miracle, sont justement la nourriture dont se nourrissent les cellules de l’épithélium. Elles en favorisent par conséquent l’entretien et la cicatrisation, lorsqu’il s’abime.
On le voit, tout le monde est gagnant dans l’opération : les bactéries et les levures, comme les cellules des intestins. On parle donc de microbes « mutualistes » ou de « symbiose », par opposition aux microbes parasites qui, eux, ne font que profiter sans rien donner en échange.
Ces microbes font aussi votre bonheur !
Mais les bienfaits de la collaboration entre votre microbiote et vos cellules intestinales (entérocytes) font encore un heureux : vous !
En effet, l’intestin fabrique certains neurotransmetteurs ; c’est le cas de 95 % de la sérotonine (hormone de la bonne humeur), de certaines enzymes (protéases, lactase) et vitamines (notamment B12 et K) et de nombreuses molécules messagères du système immunitaire (ARNm). Ces substances peuvent influencer notre stress et même déterminer notre caractère : lorsque le microbiote intestinal de souris aventureuses est transplanté dans les intestins de souris craintives, ces dernières deviennent plus audacieuses. L’expression « avoir les tripes pour » renfermerait donc une vérité littérale. Et les fidèles lecteurs de Santé Nature Innovation connaissent bien l’anagramme :
T-R-I-P-E-S = E-S-P-R-I-T.
D’autre part, ces bactéries semblent être capables de produire des composés chimiques qui régulent notre appétit, notre digestion, et notre sentiment de satiété.
Des chercheurs aux Pays-Bas se sont aperçus qu’en transplantant le microbiote de souris maigres dans les intestins de souris souffrant de syndrome métabolique (obésité, diabète, infections, liés à une baisse de la sensibilité à l’insuline), on observait une forte augmentation de la sensibilité à l’insuline des souris malades, et donc une amélioration de leur état.
Des bactéries intestinales mal-nourries provoquent des maladies
Lorsque les bactéries de votre intestin ne reçoivent pas les fibres dont elles ont besoin pour se régénérer, elles produisent moins de nourriture pour l’entretien de votre épithélium. Mais vous êtes aussi privé d’une partie des bonnes substances qu’elles produisent, et dont je viens de parler (sérotonine, enzymes, vitamines…).
Lorsque l’épithélium intestinal n’est pas bien nourri, il peut devenir hyper-perméable, c’est en particulier le cas chez les personnes intolérantes au gluten et aux protéines du lait de vache. Des bactéries pathogènes, des protéines et des glucides d’aliments insuffisamment digérés, peuvent passer dans le sang et y déclencher des réactions immunitaires néfastes. En découle une inflammation chronique qui peut provoquer avec le temps l’apparition du syndrome métabolique et de nombreuses maladies chroniques qui lui sont liées : colopathie fonctionnelle, maladies cardiovasculaires, diabète de type 2 et même cancer.
Les chercheurs ont aussi montré que l’intestin est anormalement perméable en cas de maladie de Crohn, spondylarthrite ankylosante, polyarthrite rhumatoïde, diabète de type 1 et probablement la plupart des maladies auto-immunes.
Soigner son microbiote commence à la naissance
Lorsque nous sommes dans le ventre de notre mère, notre tube digestif et notre peau sont stériles.
Mais le bébé qui nait par voie naturelle ramasse au passage les bactéries de sa mère qui vont rapidement coloniser sa peau, sa bouche, ses muqueuses et ses intestins. S’il nait par césarienne, ce sont les bactéries de l’environnement de la maternité, (celles des mains du personnel soignant ainsi que celles qui traînent dans les couloirs de l’hôpital), qui commenceront par s’implanter. Ces souches bactériennes, on s’en doute, présentent des risques pour lui.
Naissance Physiologique – Illustration Naolí Vinaver
Les études sur les bébés ont abouti à une découverte capitale concernant le microbiote. Pendant des années, les chercheurs nutritionnistes ont été interloqués par la présence, dans le lait maternel, de certains glucides complexes, des oligosaccharides que les bébés sont incapables de digérer par manque des enzymes adaptés. Or, il serait très étonnant que Dame-Nature, qui en général prévoit tout, gaspille les précieuses ressources nutritives de la mère pour apporter au bébé des aliments inassimilables.
Les chercheurs se sont aperçus que ces oligosaccharides particuliers ne sont pas là pour nourrir le bébé, mais pour nourrir des bactéries du genre Bifidobacterium (dont Bifidobactarerium infantis) spécialement adaptée aux oligosaccharides présents dans le lait maternel.
Quand tout va bien, ces bifidobactéries prolifèrent, empêchent d’autres hôtes moins désirables de s’installer, et nourrissent l’épithélium intestinal des enfants.
Ces oligosaccharides sont donc des prébiotiques, c’est-à-dire une nourriture pour le microbiote.
Les producteurs de lait maternisé n’ayant pas tenu compte, pendant longtemps, de ces découvertes, ils n’ont mis ni prébiotiques ni probiotiques dans leurs préparations, ce qui nuit à la qualité du microbiote et à l’immunité des enfants nourris au biberon.
Cela, ainsi que les naissances par césarienne, peut expliquer l’augmentation des cas d’allergies (eczéma), d’asthme, d’immunodéficience et même de maladies dégénératives chez les nouveaux- nés.
L’importance des jeux sales
Les enfants vont ensuite s’attirer toutes sortes de bactéries par les activités que tout parent connaît bien : porter à sa bouche tous les objets qui passent à sa portée, y compris les détritus ramassés dans les parcs publics et même les ordures ménagères.
Bien que ce réflexe puisse effrayer, et les parents vigilants éviteront bien sûr que leur enfant ne porte à la bouche des objets trop sales ou des produits dangereux, un microbiote confronté progressivement à des bactéries opportunistes ou légèrement pathogènes permet de développer une immunité mature qui lui permettra de mieux résister aux agressions futures. Ce processus est similaire à la maturation psychologique d’un enfant confronté progressivement aux difficultés de la vie.
A partir de 3 ans, le microbiote de l’enfant, bien que très spécifique, s’aligne en partie sur celui de ses parents, et même sur celui des personnes qui logent sous le même toit et mangent à la même table. Il peut encore évoluer, mais très difficilement. Introduire une nouvelle souche bactérienne dans le microbiote, c’est un peu comme introduire une nouvelle espèce dans une forêt à maturité : en principe, tous les espaces libres sont occupés, et il est très difficile au nouveau-venu de trouver une place. Cela ne se produit en général qu’à la suite d’une grave tempête, par exemple lorsque le microbiote a été décimé par une cure d’antibiotiques, bouleversé par une maladie infectieuse ou lorsque le germe nouvel arrivant est particulièrement fort ou favorisé par le terrain ou l’alimentation spécifique de l’enfant, par exemple le Candida albicans chez les enfants mangeant beaucoup de sucre (bonbons).
Les citadins, défavorisés
Sans surprise, les populations rurales traditionnelles, qui sont en contact avec les animaux, la terre, les plantes, et qui mangent des produits non transformés et non stérilisés, ont une microflore intestinale plus riche et plus performante que les populations des pays industrialisés vivant dans des bureaux et se nourrissant de plats préparés réchauffés aux micro-ondes.
La conséquence est donc, dans les populations occidentales, un intestin moins bien protégé et donc une plus forte sensibilité aux infections et aux maladies auto-immunes. Il résiste donc moins bien aux bactéries pathogènes : lorsque, à l’âge de 19 ans, je fis mon premier voyage au Pakistan, j’attrapai une infection intestinale pour ainsi dire dès que les roues de mon avion touchèrent la piste de l’aéroport international de Karachi. 170 millions de Pakistanais vivent pourtant dans ce pays et tous ne sont pas malades : c’est que leur intestin est bien mieux défendu que le nôtre par l’acquisition d’une immunité plus performante due aux contacts fréquents avec des bactéries opportunistes et pathogènes beaucoup plus variées.
Changer ses microbes
Aujourd’hui, les médecins sont capables de procéder à des transplantations de microbiote, ce qui consiste en réalité à prélever de la matière fécale dans le colon d’une personne (en bonne santé) pour la mettre dans le colon d’une personne malade. Cette pratique s’est avérée efficace pour guérir des personnes infectées par une bactérie pathogène devenue résistante aux antibiotiques, le Clostidrium difficile, provoquant une maladie infectieuse qui a triplé en 10 ans aux USA et fait 13 000 morts l’année dernière. Elle a quadruplé au Canada depuis 2003.
Mais avant de nous retrouver à toute extrémité, on peut aussi prendre des mesures de mode de vie pour retrouver un microbiote de qualité, qui vous protégera efficacement des attaques bactériennes, qui prendra soin de votre immunité intestinale, et qui diminuera notre risque de maladies cardiovasculaires, de diabète de type 2 et de cancer :
- avant de prendre des antibiotiques, assurez-vous auprès de votre médecin ou de votre thérapeute que c’est indispensable et qu’il n’y a pas d’autre solution pour soigner la maladie ou le trouble dont vous êtes affecté ;
- utilisez les nettoyants ménagers avec parcimonie. Votre intérieur doit être propre ; mais il faut éviter de vivre dans un contexte trop stérilisé ;
- évitez les produits antibactériens, en particulier les solutions nettoyantes pour les mains qu’on trouve aujourd’hui partout, à moins bien sûr que votre profession ne vous y oblige (si vous êtes dentiste, chirurgien, infirmière, etc…) ou que vous soyez menacé par une épidémie ;
- laissez vos enfants jouer dehors et caressez les animaux ; faites du jardinage ; reprenez contact physiquement, aussi souvent que possible, avec la Nature !
- Mangez des aliments prébiotiques, riches en fibres, pour nourrir votre microbiote : légumineuses (haricots, pois chiches, lentilles, etc.), céréales complètes (riz, épeautre, avoine, etc.), oignons, poireaux et autres légumes racines, avocats, bananes, poires et autres fruits de saison ;
- Mangez des aliments contenant des bactéries probiotiques : yaourt, choucroute, cornichons et olives fermentées ;
- Diminuez votre consommation de fast-food, qui sont des aliments qui se préparent vite, mais qui aussi se digèrent mal. Beaucoup d’aliments modernes, riches en graisses saturées et en amidon, ne contiennent presque pas de fibres, et n’offrent donc plus rien d’intéressant à fermenter dans le gros intestin. Vos amies bactéries dépérissent.
- N’abusez pas des médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens (Ibuprofène, aspirine, etc.) car ils augmentent la perméabilité.
Jean Marc Dupuis – Extrait de la Newsletter « Santé Nature Innovation » du 27/6/2013